Du second après-guerre au centenaire du lycée

(actualisé le ) par Cabinet d’histoire-géographie

Attaché à son passé, le lycée Pasteur ne reste pas étranger à son temps. À la rentrée de 1949, il obtient ses premières classes préparatoires aux grandes écoles, l’une de mathématiques supérieures, l’autre de lettres supérieures, or ces deux classes sont mixtes. Lycée de garçons depuis l’origine, malgré ses relations avec les cours secondaires de la rue Pauline-Borghèse, il s’ouvre désormais aux jeunes filles. Le pic de natalité de l’immédiat après-guerre lui apporte un surcroît d’élèves. Il perd son petit lycée, mais multiplie ses classes d’enseignement secondaire et donne toute sa place à l’enseignement supérieur. À la classe de mathématiques supérieures, elle-même dédoublée, s’ajoute une classe de mathématiques spéciales. Un cabinet d’histoire-géographie, ultime achèvement, est aménagé au deuxième étage de l’aile Perronet.

Le lycée Pasteur célèbre son cinquantenaire en 1964. En octobre, il se remémore son histoire dans une exposition ouverte au public. Dans son édition du 26, Le Monde rappelle les discussions qui retardèrent sa construction. Conçu pour 800 élèves, il en reçoit alors 2 217. Deux ans plus tard, un conseiller général s’alarme, dans une question écrite au préfet de police de Paris, des désordres sur le boulevard d’Inkermann. « Alors que ce lycée dispose heureusement d’une belle cour, écrit-il, les élèves en sortent pendant les récréations pour jouer. Ballons, bicyclettes, patins à roulettes s’entrecroisent avec ardeur sur les deux trottoirs du boulevard Inkermann, en particulier sur le trottoir opposé à celui du lycée, et jusque sur l’avenue du Roule, le long de l’église Saint-Pierre et du rond-point Winston-Churchill ». Dans sa réponse, le préfet de police indique que le proviseur conteste les faits rapportés, puisque les grilles sont fermées en dehors des heures d’entrée et de sortie, mais il promet un renforcement des contrôles, « afin d’interdire les jeux dangereux et, si besoin est, d’établir des procès-verbaux à l’encontre des étudiants récalcitrants. »

L’établissement, comme la société dans son entier, est traversé par les débats de Mai 68. Dans sa livraison de juin 1968, la revue de sociologie L’homme et la société publie l’article d’un professeur gréviste, désigné par ses seules initiales. Intitulé « Le mouvement de mai au lycée Pasteur de Neuilly », l’article décrit les « expériences pédagogiques » conduites dans l’établissement pendant la grève et déplore le rétablissement de l’ordre et des « schémas traditionnels » après le retour des non-grévistes, mais concède que le mouvement ne fut jamais majoritaire. Il rapporte les travaux des commissions de grévistes, élèves et professeurs, et reprend leurs propositions : création d’un « tronc commun » d’enseignement secondaire, suppression de la sélection et de l’orientation précoces, cogestion des établissements par l’administration, les professeurs, les élèves et leurs parents. Dans les années 1970, la mixité s’étend au lycée tout entier. L’enseignement supérieur gagne en variété avec la création de classes préparatoires commerciales et d’une première supérieure. L’enseignement secondaire n’échappe pas à la massification scolaire. Dans un courrier au Monde du 14 septembre 1978, en réponse à un article sur le baccalauréat au titre explicite — « Un trompe-l’œil » —, André Perrin, dixième proviseur du lycée, rappelle que le nombre des bacheliers était dix fois moins grand en 1940.

Le lycée Pasteur célèbre son soixante-quinzième anniversaire en 1989. Dans l’album commémoratif publié en mai, sous le titre « Petite histoire d’un grand lycée », Michel Arondel, ancien élève et professeur de chaire supérieure, reproduit l’article de son prédécesseur Albert Jourcin et lui donne une suite. Réunies en un seul texte et plusieurs fois remaniées, les deux contributions sont reprises par le lycée, dans une série de brochures, à la fin des années 1990, formant une sorte d’histoire officielle. Comme l’indique Michel Arondel dans ses dernières lignes, le bâtiment connaît alors une première restauration, celle de sa toiture et de sa charpente, menacées d’effondrement. Dans les deux décennies suivantes, une suite ininterrompue de travaux cherche à concilier sauvegarde du patrimoine, sécurité des élèves et du personnel et modernisation de l’enseignement ou de la vie scolaire : aménagement d’un libre-service et d’une salle de restaurant couverte d’une pyramide de verre, rénovation des salles de classe et de conférence, de la bibliothèque et des laboratoires spécialisés, réfection des fenêtres, des façades et du campanile, informatisation des salles et mise en réseau de plusieurs centaines d’ordinateurs, création successive de trois sites sur la toile. À partir de 2007, ses classes préparatoires littéraires et commerciales quittent à regret le boulevard d’Inkermann.

Le lycée Pasteur célèbre son centenaire en 2014. Comme en 1964 ou en 1989, il commémore sa création à la date de son ouverture officielle, par décret du président de la République, et son anniversaire coïncide avec celui de la Grande Guerre, mais l’histoire lui concède d’autres dates de naissance : celle de la pose de sa première pierre, le 6 juillet 1912, celle de la première rentrée des classes dans ses murs, après sa réquisition de guerre, le 1er octobre 1919, celle enfin de son inauguration officielle, le 18 octobre 1923, trente ans après la première délibération municipale à son sujet. Établissement d’enseignement centenaire, le lycée Pasteur est aussi un monument du patrimoine, un lieu de mémoire et un objet d’histoire.

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